Samedi dernier, spectacles partout, Front de Gauche nulle part

Publié le par lavaguevilleurbanne

Ayant quitté le Parti de Gauche et le Front de Gauche, il y a deux semaines, en raison d'un désaccord profond avec leurs stratégies et leurs pratiques, tant au plan national que local - j'aurai l'occasion de m'en expliquer plus en détail ultérieurement -, j'ai pu mettre ma décision (difficile, forcément, après trois ans et demi d'engagement intensif) à l'épreuve de deux spectacles politiques proposés samedi soir.

Jean-Luc Mélenchon montrait une caricature de lui-même, hélas, chez Ruquier, ne parlant presque que de lui et des attaques dont il a fait l'objet, tolérant difficilement les questions de ses interlocuteurs et les interrompant sans cesse, en multipliant les dérapages (Eva Joly envisagée comme une "belle prise", elle appréciera..., les journalistes "bourrins", les municipales qualifiées de "Clochemerle-Les-Bains", etc.). Sa violence verbale et son mépris étaient très grands à l'égard... d'un peu tout le monde ; en revanche il semblait très satisfait de lui-même et de sa garde rapprochée - je suis malin, nous avons tout prévu, je travaille tout le temps, les autres sont bêtes, ignorants... c'est ce qui est le plus triste de sa part, et à mon avis le plus nuisible au PG, et au FDG, ces derniers jours. 

Au cours de son show, Jean-Luc n'a pas parlé du Front de Gauche, ni de ses composantes. La Marche du 5 mai pour la VIe République, lancée au départ par lui seul, est censée rassembler la majorité de l'électorat de gauche dans la rue, ce qui obligera le Président de la République à confier le pouvoir à une nouvelle majorité, menée par lui : ce projet immédiat et prioritaire doit mobiliser tous les militants et sympathisants, en mettant de côté la campagne contre l'austérité (lancée il y a un mois et demi seulement), et les autres travaux en cours, comme les programmes concrets du FDG pour les municipales (inexistants pour l'instant : le PC, associé au PS, n'a jamais eu à s'en préoccuper)...

Dans les dernières minutes, il défendra brillamment Robespierre ; mais dans l'ensemble, l'émission confirme mon sentiment d'un immense gâchis.

VOIR EN PARTICULIER A PARTIR DE LA MINUTE 13 ET LA MINUTE 34, avec les questions affûtées de Natacha Polony :

 

Presqu'au même moment, les sénateurs communistes faisaient un coup d'éclat : lors de l'examen du projet de loi confirmant l'"Accord Medef" -, les sénateurs du groupe CRC ont retiré leurs amendements et quitté la séance.  

Dans un article sur le site du Parti de Gauche, François Delapierre dénonce le "déshonneur et le discrédit" de la Ve République symbolisés par la procédure du vote bloqué utilisée par le gouvernement pour interrompre les débats au Sénat. Selon lui, le gouvernement, en "fracturant le côté gauche de l'hémicycle", a traité "nos sénateurs" comme s'ils étaient dans l'opposition... C'est vrai, et les effets médiatiques des sénateurs communistes ne sont pas une mauvaise chose.

Pourtant, qui peut ignorer l'art et la manière qu'a le PCF de s'opposer symboliquement au PS, sans jamais aller jusqu'à l'affrontement et la rupture ? Les relations souvent compliquées entre ces deux partis n'ont jamais remis en cause la sacro-sainte "union de la gauche" à laquelle le PCF doit, tout simplement, sa survie depuis les années 80 : là réside le grand malentendu entre le Parti de Gauche et le PCF, depuis la création du Front de Gauche il y a quatre ans.

Le PC n'a jamais rompu le contact avec le PS, ni avant ni après la présidentielle de 2012. Au bout de quatre ans, on ne peut plus sérieusement dire qu'il faut laisser aux communistes le temps de s'habituer au FDG, car ils aurait peur de voir leur parti disparaître : c'est le FDG qui a sauvé le PCF de la disparition à court terme ! La vérité, c'est qu'une minorité de militants communistes actifs s'investissent dans les collectifs FDG, et que le PC ne participe au FDG que pour autant que celui-ci serve ses intérêts propres : en économie, on appelle cela un "jeu non coopératif", en clair "pas de confiance, chacun pour soi"... Pourquoi pas, ce n'est ni absurde ni condamnable, mais il serait temps de le dire haut et fort. Il faut aussi comprendre que le résultat de ce genre de stratégie est toujours très inférieur à ce qu'il aurait été dans le cas d'une réelle coopération entre les partenaires. 

Ce malentendu initial, ce tabou originel, n'ont cessé de compromettre l'efficacité et la cohérence des collectifs locaux du Front de Gauche, de dégrader la confiance entre ses organisations partenaires, et de faire grandir le malaise et l'incompréhension chez de nombreux militants, qui croyaient à l'émergence d'un véritable parti antilibéral, rassembleur, cohérent et uni. Jusqu'à quand les responsables du Front de Gauche vont-ils manipuler leurs militants et sympathisants, leur énergie et leurs espoirs en occultant le double jeu du PCF ? Aucun avenir ne peut se construire sur le mensonge ; à l'heure actuelle, le Front de Gauche n'est qu'un faux-semblant, un théâtre d'ombres.

Certes le PCF a plusieurs fois exprimé des désaccords à l'Assemblée et au Sénat, sur certains textes du gouvernement, mais en général de manière modérée, en s'abstenant. Le PCF a discuté (seul) avec le parti majoritaire à l'issue des législatives ; c'est même le PS qui a "fourni" (lors d'une rencontre entre les deux présidents de groupe, Bruno Le Roux - PS - et André Chassaigne - PCF) les députés d'Outre-mer qui ont permis la constitution d'un groupe de 15 députés "Front de Gauche" à l'Assemblée (l'un de ces députés, M. Azerot, a voté pour le TSCG et pour l'ANI...). Aujourd'hui, le PCF garde  évidemment le contact avec le PS, localement et nationalement, en vue des prochaines élections municipales.

En outre, on peut remarquer que "nos sénateurs" sont exclusivement des membres du PCF (et du PC réunionnais) : ce n'est pas un groupe Front de Gauche. La seule sénatrice du PG, Marie-Agnès Labarre - qui avait fait un beau travail notamment au moment de la lutte pour les retraites en octobre 2010 - a perdu son siège en septembre 2011, suite à la constitution des listes d'"Union de la Gauche" : PS-EELV-PCF (seul) dont le PG a été exclu, lors des dernières élections sénatoriales.  

E. B.

Publié dans Front de Gauche

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G
Vous avez mal entendu, en fait quand il discute en quoi le front de gauche et son orientation sont révolutionnaire, là aussi il cite le front de gauche. Je ne suis pas d'accord avec vous, moi aussi<br /> je m'énerve tout seul quand j'entends ce Monsieur Carron, soutenir que Mr Mélenchon ne serait présent au parlement européen que 61% alors qu'il sait qu'il a été le représentant du Front de Gauche à<br /> la présidentielle. En allant même contredire les 84% alors que c'est juste depuis la fin de l'élection présidentielle. en fait, il ne souhaite que Mélenchon parle de politique car il lui reproche<br /> même d'expliquer pourquoi il était absent en mars 2013 pour la discussion sur le Budget alors qu'ils lui ont posé la question.
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G
Bonjour Monsieur,<br /> <br /> Le front de gauche a été cité vers la 30e minute à propos des élections européennes. Vous avez le droit de ne apprécier mais il parle essentiellement de politique. Vous remarquerez qu'il passe son<br /> temps à expliquer pourquoi il n'est pas d'accord avec Monsieur Carron. En effet, il n'a pas toujours été à son meilleur dans l'émission mais avouez que le journaliste l'attaque également durement<br /> ce qui explique le ton du débat.<br /> Enfin et vous le savez, la marche du 5 mai est aussi une marche contre l'austérité.<br /> A bientôt au cours de prochain évènnement
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