Pour un deuxième souffle du Front de Gauche

Publié le par lavaguevilleurbanne

Un très bon billet, à la fois pertinent et constructif, de Laure Zudas, sur son blog. Je partage totalement son point de vue :

 

Le deuxième souffle ?

Voilà quelques semaines que les mots me font défaut pour écrire un billet d’humeur… Encore que pour être exacte, je devrais plutôt dire que c’est le trop plein de mots qui me tient éloigné de ce blog, tellement il y a à écrire dans cette difficile période pour la gauche.

J’écris simplement la gauche car je sais aujourd’hui, encore plus qu’hier, qu’il est vain de vouloir faire une distinction entre gauche et gauche. Pour la majorité des électeurs, il y a la gauche et la droite, point barre !

Devant cette évidence géométrique ancestrale, ces derniers temps dans mon parti, le Parti de Gauche, nous nous sommes appliqués à différencier la gauche de LA gauche, déclarant que nous étions cette gauche, la « vraie » gauche, que « l’autre » gauche n’était plus tout à fait de gauche et qu’elle était finalement plus de droite que de gauche, voire même que cette gauche était tout à fait de droite.

Aussi juste que soit cette état de fait (ce gouvernement dit « socialiste » ne fait pas une politique de gauche et la caste des solfériens n’est clairement pas de gauche), nous avons peut-être un peu oublié en route une donnée fondamentale : celui qui ne peut pas remplir son caddie parce que tout est trop cher et que son salaire n’y suffit plus, se fout totalement de savoir que c’est nous LA gauche, que notre gauche est meilleure que l’autre et que cette autre gauche, beaucoup moins de gauche que nous, est en partie responsable de son incapacité à remplir son caddie.

Celui qui peine à remplir son caddie, fût-il de gauche, se tape de notre cuisine interne et de ces distinctions difficilement audibles, surtout le ventre vide. Il veut juste qu’on lui apporte une solution rapide : augmenter son salaire ou baisser les prix des denrées alimentaires, parce que lui et sa famille doivent croûter pour vivre !

Les dernières échéances électorales et Villeneuve sur Lot plus que les autres, nous ont démontré notre erreur : entre la gauche et LA gauche, l’électeur choisit la droite parce qu’il ne voit qu’une chose, la gauche -dont il faut se souvenir que pour tout le monde, à part nous, elle est actuellement au pouvoir- est incapable de solutionner ses problèmes !

Tout le reste n’est que littérature d’initiés, que celui dont je parle ci-dessus ne risque même pas de lire un jour, parce que, souvenons-nous en bien, son salaire ne lui permet pas non plus de s’offrir un bouquin, fût-il écrit par LA VRAIE gauche !

C’est une feuille de route avec un message clair, des mots d’ordres ancrés dans la réalité et audibles pour tous, que Jean-Luc Mélenchon a portée avec tant de talent durant la campagne présidentielle.

Comme il est le seul à savoir le faire dans notre parti, sans démagogie, à grand renfort de pédagogie mais sans jamais se laisser aller à parler à des abrutis, il a porté les 35 heures, l’augmentation du Smic à 1700 euros, le revenu maximum, le retour de la retraite à 60 ans, l’encadrement des loyers, la taxation des revenus du capital à hauteur de ceux du travail, la nationalisation du secteur de l’énergie, le référendum sur le nucléaire, la planification écologie…

Comme il est le seul à savoir le faire dans notre parti, il n’a pas oublié l’humour, l’amour et la poésie lorsqu’il s’adressait à tous, conscient qu’en plus de parler à nos esprit il fallait aussi s’adresser à nos cœur…

Dès l’automne qui a suivi les élections présidentielles et législatives, comme les feuilles mortes sur les trottoirs parisiens, la feuille de route qui avait mobilisé 4 millions d’électeurs a été balayée…

La pédagogie, l’humour, l’amour et la poésie ont cédé la place aux balais, nos mots d’ordres sont devenus 6ème République, Constituante, écosocialisme et autonomie conquérante… concepts pleinement utiles au renouvellement idéologique de la gauche, mais dont le lien qui va du salaire au caddie n’est pas évident pour tous !

Parce que ceux qui misèrent au quotidien n’ont pas vraiment l’esprit disponible pour entendre parler d’une 6ème République écosocialiste, aussi nécessaire soit-elle.

Occupés à ré-inventer les fondamentaux d’une gauche renouvelée, nous nous sommes finalement retrouvés « hors sol », comme l’écrit fort justement mon camarade Nathanaël.

Bercés par cette lévitation transcendantale, nous avons pris l’habitude de nous réunir et de nous parler à nous-même plutôt que de continuer à parler à tous, dans un « entre-soi » aussi confortable qu’abstrait.

Et c’est peut-être cet état de lévitation, qui maintient nos pieds un peu loin du sol qui nous fait croire dur comme fer qu’il nous suffit d’avoir raison pour que tous s’en rendent compte et que tous nous rejoignent.

Forts de ces concepts érigés en mots d’ordre mais qui ne parlent qu’à nous, sans mettre au préalable sur la table les éléments indispensables à cette « majorité alternative » que nous appelons de nos vœux, nous invectivons les écologistes et la gauche du PS, qui n’ont pas encore compris que le ralliement à notre écharpe rouge était aussi inéluctable que la révolution citoyenne que nous attendons de pied ferme -faut-il qu’ils soient bornés- !

Qui milite sur les marchés, fait du porte à porte, tente d’élaborer un programme municipal ou une liste électorale sait bien qu’il n’en est rien. Dans la majorité des cas, celui qui part tout seul arrive tout seul, quand il ne s’est pas perdu en route !

Et à défaut d’en prendre aujourd’hui la mesure, c’est bien vers le mur que nous allons, seuls, certes conduits par des gens intelligents, brillants et éclairés, mais dont la lumière éclaire aujourd’hui surtout l’intérieur !

Parce qu’il faut bien se rendre a l’évidence, malgré les réussites indéniables que nous avons à notre actif, bien que nos analyses sociales et économiques soient aujourd’hui validées par les faits : nous ne rallions pas !

J’entends déjà certains camarades hurler au crime de lèse-pg ! Aux loups ! Aux loups ! Lâchez la meute sur ceux qui écrivent ce que seuls les aveugles ne voient pas.

À tous ceux là, si prompts à donner des brevets de bons ou de mauvais militants, décernant les médailles de la gauche de la gauche, confits dans le dogme, accrochés à leurs certitudes comme des arapèdes à leur rocher, utilisant le mot camarade comme un mouchoir jetable, à tous ceux-là je n’ai plus rien à dire, ils ont épuisé ma patience, égratigné ma bonne humeur et lassé mon optimisme.

À tous les autres, militants sincères et dévoués, qui n’ont pas peur des questions sans réponses évidentes, j’adresse ce constat, aussi lucide que douloureux et à l’instar de mon camarade Alain, je dis qu’il nous faut dès à présent, avec toutes les forces disponibles pour cela, oeuvrer pour renverser le rapport de force à gauche en créant les conditions du rassemblement qui amènera notre majorité alternative au pouvoir.

Rassembler plutôt que rallier, est un chemin qui sera certainement moins confortable pour nous, qui ne ferons sans doute pas l’économie de sacrifier en route quelques unes de nos radicalités concrètes pour parvenir à l’union, mais n’est-ce pas déjà ce que nous avons fait au FDG en concédant un référendum sur le nucléaire, nous qui sommes pour son abandon définitif ?

Il n’y a qu’une voie qui conduise au rassemblement, chercher et trouver ensemble, avec le FDG, les écologistes et la gauche du PS, le dénominateur commun qui nous permettra de diriger le pays ensemble, pour l’intérêt général. Il est plus que l’heure !

Bien sûr, si l’on souhaite ne bousculer ni nos rêves, ni nos certitudes, alors continuons sur cette voie et nous pourrons bientôt nous satisfaire d’être les derniers du cimetière à avoir eu raison.

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Afin d’éviter tout procès en haute-trahison, je crois utile de préciser que je suis bien entendu convaincue qu’il y a bel et bien une différence de taille entre nous et cette « gauche de gouvernement » : nous sommes de gauche.

Je ne méconnais pas non plus la difficulté qu’un parti de gauche comme le nôtre a à exister sous un quinquennat dit « socialiste ».

Pour autant, je ne crois pas utile le temps que nous perdons à essayer de rendre cette différence visible. Cela ne sert à rien et n’aide personne, ni ceux qui galèrent en subissant de plein fouet la politique libérale poursuivie par Hollande, ni nous, comme en témoignent les résultats électoraux post-présidentielle, seule jauge à notre disposition dans cette V° République sous laquelle nous sommes encore.

Pour finir et que tout soit dit, je précise également que je sais la nécessité des concepts idéologiques qui refondent la gauche et je suis fière d’être dans un parti qui ne renonce pas à inventer de nouvelles conditions au vivre ensemble. Ce qu’une je déplore, c’est que ces concepts, développés « hors-sol », nous tiennent un peu trop éloignés du terrain.

Entre mouvement et position, comme nous l’expose brillamment le camarade Romain Jammes, je choisis mouvement ET position.

Publié dans Front de Gauche

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